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mardi 14 octobre 2014

Les éleveurs ovins désarmés face à la prolifération des loups

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AUVERGNE > CLERMONT-FERRAND 14/10/14 - 06H00

Les éleveurs ovins désarmés face à la prolifération des loups

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Mercredi 3 octobre 2014. Témoignage attaque de loups chez les ovins - COUBLE Pierre
Mercredi 3 octobre 2014. Témoignage attaque de loups chez les ovins - COUBLE Pierre
Face à la prolifération des loups, les éleveurs ovins du Massif central tirent la sonnette d’alarme. Après la Lozère particulièrement touchée, la Haute-Loire, le Cantal et le Puy-de-Dôme sont directement menacés. État d’alerte.

Timide et digne, elle a pris le micro malgré le trac. Elle a raconté avec ses mots son enfer quotidien. D’abord, les attaques. Les animaux déchiquetés. L’angoisse, pesante, omniprésente. Qui vous ronge progressivement de l’intérieur. Puis, l’obligation de sortir les brebis tous les matins et de les rentrer tous les soirs. L’unique solution, faute de mieux. Mais qui, bientôt, devient trop lourde. Les enfants, stressés, qui ne voient plus leurs parents. La vie de famille soudain inexistante. L’impression d’être seule. Abandonnée.
« 15 millions d’euros dépensés par an, l’équivalent de 500 institutrices »
Les brebis sont parties définitivement le 19 septembre. Et là, sous un chapiteau du Sommet de l’élevage, Nathalie Brunel craque. Les larmes coulent sur ses joues comme un flot trop longtemps contenu. Une digue qui vient de sauter. L’émotion, palpable, est d’autant plus forte que la désormais ex-éleveuse de Meyrueis en Lozère est entourée de collègues qui vivent la même chose. Mais ont décidé de continuer à se battre.
Pour combien de temps ? Tous se posent cette question. Car tous racontent la même histoire. « J’ai 600 brebis sur les estives collectives du Mont Lozère, explique Gilles Paulet, éleveur à Prévenchères (Lozère). Nous avons subi les premières attaques cette année, cinq fois en plein jour. Le berger a vu à trois reprises le loup. Nous avons eu cinq brebis tuées, huit perdues et cinq blessées. Après la cinquième attaque, nous avons décidé de quitter l’estive car nous avions des brebis gestantes. »
Les solutions mises en œuvre jusqu’à aujourd’hui n’ont donné aucun résultat. « Que ce soit la mise en place de parcs électrifiés et sécurisés pour la nuit ou le recrutement d’aides-bergers », déplore Gilles Paulet.
« Les loups ont mis le temps mais ils se sont adaptés. Aujourd’hui, ils attaquent tôt le matin ou le soir et nous sommes démunis », complète Louis Maurin, un autre éleveur de Prévenchères, venu témoigner au Sommet de l’élevage.
Désarmés, les éleveurs ont l’impression de revenir près d’un siècle en arrière. « Quand nous avons subi la première attaque, il y a quatre ans, personne n’a voulu nous croire, regrette Louis Maurin. On nous a pris pour des rigolos. Mais si nous faisons un bond de cent ans en arrière, on se rend compte que les anciens ont éradiqué le loup exactement pour les mêmes raisons. »

Chasser le loup en battue
D’où une première revendication très claire. « À court terme, nous demandons de pouvoir chasser le loup en battue de grand gibier sur la Lozère et l’Ardèche, exige Olivier Maurin, frère de Louis. Le préfet de la Lozère a bien pris un arrêté l’autorisant mais uniquement sur trois communes. Vous pensez bien que le loup rigole. Selon les autorités, la meute compterait six individus. Nous estimons qu’ils sont au minimum dix. Si rien n’est fait, demain, les loups seront en Aveyron et en Haute-Loire dans deux ans et ensuite ils finiront par atteindre le Cantal et le Puy-de-Dôme. »
« C’est le statut du loup qui pose problème. Ce n’est plus une espèce menacée mais en développement, insiste Serge Préveraud, le président de la Fédération nationale ovine (FNO). L’État dépense 15 millions d’euros par an pour indemniser les éleveurs, l’équivalent de 500 institutrices. Sans faire avancer la société. Au contraire, depuis que le loup est dans les montagnes, il y a de plus en plus de broussailles et de moins en moins d’activité économique. »
Les massifs hexagonaux ne sont plus les seuls touchés, le loup sévit désormais en plaine. « Je suis installé dans le centre de la Meuse et depuis un an, nous en sommes à cinquante attaques, dévoile Daniel Dellenbach. C’est une remise en cause du métier. L’impact psychologique est terrible. C’est une certitude, le loup ne va pas rester cantonné aux montagnes. »
« Pour toutes ces raisons, il y a urgence à agir », conclut Serge Préveraud.
Dominique Diogon

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